Au coeur de la nuit

Des mains putréfiées voulaient l'attirer à eux, GaJin tentant de les fuis se mit à courir, mais ils étaient à ses trousses, elle devait aller plus vite, il en allait de sa survie. Elle courait et courait, ses poumons étaient en feu, mais elle savait qu'elle devait continuer. Quand tout à coup, elle chuta, probablement à cause d'une racine. Elle tenta de se relever, mais c'était trop tard, ils étaient déjà là...
GaJin se réveilla en sursaut, toute tremblante; encore ce cauchemar. Quelle heure pouvait-il être? Elle n'en avait aucune idée, c'était la nuit en tous cas. Elle se leva et regarda par la fenêtre, personne ne traînait dans les ruelles, peut-être était-ce le bon moment pour récolter quelques unes de ces fleurs qui ne s'ouvrent que la nuit, elle en avait besoin pour s'exercer à des cataplasmes et autres choses de ce genre. Le petit problème était que cette fleur, non contente de ne s'ouvrir que pendant la nuit, ne voulait pousser que dans le cimetière, or le cimetière était étrange la nuit, différent d'en pleine journée, mais il fallait qu'elle le fasse si GaJin tenait à progresser.
Elle s'habilla, releva ses cheveux et sortit. Les ruelles étaient désertes, et le bruit de ses pas résonnaient sur les pavés. Passer sa nuit dans la cimetière l'effrayait moins que de passer devant le centre culturo-médicinale, qui la nuit, semblait être habité par des créatures sorties tout droit d'un film d'horreur. GaJin s'était bien fait une idée à ce sujet, étant un ancien hôpital, cet endroit ne pouvait qu'être hanté; elle s'imagina alors des personnes défigurées errant sans but, traînant leurs potences le long des couloirs. Cela lui remit aussitôt en mémoire les images de son cauchemar, elle secoua la tête pour chasser ses mauvaises pensées.
Elle était arrivée, le cimetière se trouvait juste face à elle, il ne lui restait plus qu'a passer devant le centre. Les bruits qui résonnaient à l'intérieur du bâtiment la firent hésiter; voulait-elle vraiment y aller? Avait-elle le courage de le faire? Non ! Ce n'était pas le moment de se poser ce genre de question, il le fallait un point c'est tout.
Serrant les poings, le regard déterminé, GaJin se lança et courut pour atteindre le cimetière, tâchant de faire abstraction de ses bruits lorsqu'elle passa devant à toutes vitesses, elle n'accorda même pas un regard à l'établissement.
Sa respiration reprit un rythme normal une fois qu'elle fût dans le cimetière, même si elle entendait toujours ces cris, il lui semblait qu'ils venaient de loin, même si ils étaient juste à côté.
Elle jeta un coup d'oeil au temple, il était magnifique, scintillant à la lumière de bougie que les habitants allumaient lorsqu'ils venaient s'y recueillir. Mais ce n'était pas non plus le moment de rêvasser devant la beauté du paysage, elle ne devait pas oublier sa mission.

La lune éclairait les petits monticules de terre, au fil du temps, ils s'étaient recouvert d'herbes, mais pas la moindre trace de fleurs. Où pouvaient-elles bien se trouver? GaJin arpenta le cimetière de long en large, fouillant un peu partout. Elle ne comprenait pas pourquoi la plupart des villageois avaient peur du cimetière la nuit, il était très tranquillisant. Elle était en train de réfléchir à ce sujet quand elle finit par voir ces fleurs; elles étaient, en lisière de la forêt, magnifiques, comme si elles l'attendaient. GaJin s'en approcha, une fois à leur hauteur, elle s'agenouilla au sol afin d'en cueillir quelques unes, mais elle avait un mauvais présentiment, son instinct lui disait de s'en aller aussi qu'elle le pouvait, mais elle essaya de dominer cette sensation, il lui fallait ces fleurs. Elle tendit la mit pour cueillir la première qu'elle trouverait, lorsqu'elle entendit des bruits bizarres, non pas l'écho des cris du centre, mais quelque chose qui ressemblait plus à des bruits de pas derrière elle. N'osant pas se retourner, la jeune femme ferma les yeux et déglutit, attendant de voir ce qui allait se passer.

Encore une soirée tranquille à Hollowish.
Keiitaro regarda dans les allées vides de la bibliothèque, et haussa les épaules. Il n'y avait que lui pour songer à ouvrir jusqu'à vingt-deux heures, vraiment. Déjà que les gens ne venaient pas trop la journée... Il n'y avait guère que le samedi où il voyait du monde. D'où sa préférence pour les autres jours de la semaine.
Il se dirigea vers l'arrière-salle, où quelques livres attendaient tranquillement d'être étiquetés et rangés, et déclencha les interrupteurs. Un à un, les néons de la véranda puis ceux de la salle principale s'éteignirent, laissant la lanterne de l'entrée comme dernière source de lumière.
Keiitaro, nullement impressionné, attrapa son blazer et sortit, prenant soin de fermer à clé. Non pas qu'il ne faisait pas confiance aux villageois, mais il savait qu'il y avait d'autres choses qui pouvaient vouloir entrer. Et puis c'était devenu un réflexe, alors il ne se posait même plus de questions.

Il avança sur la place, où seuls deux ou trois lampadaires brillaient encore, les autres étant en panne; manque de chance, l'électricité était tellement instable depuis le Cataclysme que le seul électricien d'Hollowish ne pouvait pas s'occuper de tout en même temps, et les lampadaires du centre ville étaient bien le dernier de ses soucis.
Keiitaro fut cependant sorti de sa contemplation silencieuse des réverbères lorsque des bruits de pas résonnèrent sur les pavés, des bruits venant des quartiers résidentiels. Lui-même n'y habitait pas, n'aimant pas trop l'idée que les voisins les plus proches pourraient voir ce qu'il se passait chez lui en un coup d'œil; il avait trouvé une maison encore en relativement bon état en retrait, du côté ouest du village. Sachant que les résidences étaient au nord et que le complexe médico-scolaire comme il l'appelait était au sud-est, il se considérait relativement bien placé.
Toujours est-il que les bruits de pas se rapprochaient.
N'ayant pas envie de parler ou quoi que ce soit, il recula calmement jusqu'à se coller dos au mur de la bibliothèque, dans l'ombre, et réprima un petit rire lorsqu'il vit qui passait à cette heure tardive.
Ahn GaJin.
Évidemment, qui d'autre à part elle, la sorcière, et éventuellement Antoinette pour une consultation tardive, pouvait bien s'amuser à errer la nuit...
Lorsqu'elle fut assez éloignée à son goût, il reprit le chemin de sa demeure, mais quelque chose au sol attira son regard. Il se pencha et ricana. La coréenne avait fait tomber une boucle d'oreilles.
Il ramassa l'objet, considera de ne lui rendre son bien que le lendemain, puis changea d'avis. De toute façon il n'était pas encore fatigué.

Keiitaro suivit donc GaJin, s'amusa de sa petite course devant le centre culturo-médicinal, et sa curiosité fut touchée lorsqu'il vit qu'elle se rendait au cimetière. Ce qu'elle pouvait bien aller y faire, Dieu seul le savait, et il n'allait certainement pas le dire à Kei, du coup celui-ci jugea qu'il allait peut-être observer un tantinet avant de rendre la boucle d'oreille.
Il s'arrêta à l'entrée du lugubre endroit, plus agacé qu'effrayé, et regarda la jeune femme fouiner autour des quelques tombes.

*Elle cherche des fleurs, évidemment... Elle veut devenir comme l'autre sorcière...*

Il soupira, un peu déçu, et s'avança. Une fois qu'il fut derrière elle, alors qu'elle était accroupie, il grogna.

- Eh, je crois que c'est à toi...

Bien qu'elle s'attendait à ce que quelque chose se passe, son imagination ne l'avait pas préparée à ça, elle s'était attendue à ce que les morts reviennent à la vie parce qu'elle les avait dérangé ou quelque chose comme ça, mais elle ne s'attendait pas à ce qu'une personne banale, dans le sens vivant du terme, s'adresse à elle. Etait-elle déçue? Peut-être bien au fond; ses cauchemars la terrifiaient depuis bien des années et pourtant...mais GaJin n'essaya même pas de comprendre sa réaction, cela faisait bien longtemps qu'elle avait renoncé à faire le lien entre les trois personnalités qui se disputaient son cerveau.
Elle se retourna et reconnut Keiitaro, sa déception s'envola aussitôt, au contraire, maintenant elle était heureuse de voir quelqu'un avec qui elle s'entendait plutôt bien. Un sourire éclaira son visage, puis lui s'envola, dès qu'elle eût posé les yeux sur ce qui était à elle. Sa boucle d'oreille, la dernière chose qui la ralliait à sa vie passée, comment avait-elle pût être aussi bête que pour la perdre; d'ailleurs, où et comment l'avait-elle perdue? La colère la submergea comme un raz-de-marée. Elle essaya de se contenir, mais ce n'était pas facile, cette part d'elle était et avait toujours été la plus forte. La meilleure solution était qu'elle se taise, elle le savait; si elle se mettait à parler, elle était sûre qu'elle se mettrait à crier et à dire des choses qu'elle regretterait plus tard, même si au fond, la seule personne à qui elle en voulait, c'était elle-même.
Sans rien dire, elle reprit sa boucle et la remit en place, s'assurant cette fois qu'elle ne la perdrait plus, et se remit à la cueillette de fleurs. Certes, c'était impoli mais il valait mieux ça que se recevoir une volée d'injures, sans avoir rien fait pour ça, que du contraire.
Il ne lui fallut pas longtemps pour se sentir coupable, aussi instable était-elle, elle n'avait pas le droit d'en faire payer son entourage, aussi, désormais honteuse, elle murmura une faible :

- Merci beaucoup.

Sans même prendre la peine de se retourner, ce qui, encore une fois était impoli, si elle avait pût, elle aurait été rejoindre ces cadavres sous terre tellement elle avait honte en ce moment même. Pour se rattraper, elle essaya d'entamer la conversation :

- Qu'est ce qui t'amène dans notre si joli cimetière à cette heure?

La question était directe, en fait ça ne lui regardait pas après tout, il faisait ce qu'il voulait de ses nuits, c'était juste son impulsivité qui avait reprit le dessus. Autant de changements d'humeur en si peu de temps était épuisant, mais GaJin avait eût le temps de s'y habituer, d'apprendre à vivre avec, en revanche, c'était différent pour les gens qu'elle côtoyait, aussi essayait-elle de se contenir le plus souvent, mais ce n'était pas chose aisée.

Keiitaro haussa un sourcil en voyant la réaction de GaJin, puis ricana. C'était tellement typique de la jeune femme, ces changements soudains de tempérament. Paradoxalement, il savait qu'il aurait presque pu les prevoir. Presque on a dit.
Alors qu'elle se retournait pour recommencer sa cueillette sans rien dire, il se prit à regarder d'un œil distrait les noms et dates sur les sépultures, balayant d'un geste ennuyé le vague "Merci" qu'il avait cru entendre.
Lorsqu'elle lui demanda ce qu'il faisait là, cependant, il se contenta de s'enfoncer les mains dans les poches de son jean, et leva le regard vers le ciel.

- C'est dégagé, on voit les étoiles. Demain il fera beau.

*Aléatoire? Oui, pourquoi, vous vous attendiez à de la logique?*

Le japonais s'accorda l'esquisse d'un demi-sourire, et s'accroupit ensuite à côté de GaJin.

- Qu'est-ce que c'est? demanda-t-il en désignant les fleurs du menton.

Pas que l'herbologie l'intéressait beaucoup, mais s'ils devaient tout deux rester plantés là, autant trouver un sujet commun d'intérêt. D'autant plus que s'il voulait connaitre le pourquoi du comment de la balade nocturne de sa camarade, il lui faudrait bien user de discours inutiles à un moment ou à un autre.

Comme elle devait s'y attendre, Keiitaro ne répondit pas à sa question, il fit juste une vague allusion au temps. Cela ne provoqua aucune réaction chez GaJin, c'était juste habituel. C'était mieux ainsi d'ailleurs, elle n'avait pas l'impression que sa place était à l'asile de cette façon.
Par contre, elle fût légèrement surprise qu'il s'intéresse à ce qu'elle était en train de faire, elle ne lui savait pas une passion pour l'herbologie, d'ailleurs, à bien y réfléchir, elle ne savait rien ou presque de ce qui l'intéressait, elle savait juste que les gens qui lisaient beaucoup s'intéressaient souvent à un tas de choses, or Keiitaro était le bibliothécaire d'Hollowish, elle supposait donc qu'il devait lire beaucoup.
Puis ça lui faisait plaisir de pouvoir partager ça avec quelqu'un, aussi répondit-elle d'un ton enjoué :

- La belle de nuit, elle ne s'ouvre que la nuit, et bizarrement, ne pousse qu'ici, peut-être que la terre est plus riche du fait que...enfin peut-être que la terre est plus riche quoi.

Comme d'habitude, elle parlait trop, et pourtant, c'était le sujet qu'elle devait éviter, mais aussi celui sur lequel elle parlait le plus facilement; elle se demandait souvent si c'était aussi le cas pour les autres ou encore une fois, juste pour elle.
Oubliant ce sujet, elle reprit son exposé sur la fleur :

- Et bien sûr, comme elle ne s'ouvre que la nuit, son parfum ne se répand que pour les noctambules, sens.

Elle lui tendit l'une des fleur qu'elle venait de cueillir en souriant.
Par moment, elle ressemblait encore à une petite fille, c'était certainement dû au fait que son enfance avait été brisée, même avant les cataclysmes, ou était-ce encore un autre effet de ses instabilités? Elle frissonna à cette pensée.

- Si ça marche, je pourrais en faire des cataplasmes et des onguents efficaces, je sais que je n'ai pas l'étoffe d'un médecin, mais ça peut toujours servir.

C'est sûr que la différence entre son "métier" et sa passion était énorme; l'un exigeait de se lever aux aurores pour passer ses journées et attraper le plus de poissons possibles, l'autre demandant de faire certaines choses à certains moments précis, comme dans ce cas en pleine nuit, mais GaJin ne s'en plaignait pas et les deux étaient utiles, et tout ce qui pouvait l'empêcher de fermer l'oeil était bon à prendre et c'est sûr qu'en alternant les deux, elle n'avait plus trop le temps de dormir.

Antoinette le cherchait désespérement à travers le village à grands coups de "TIMMMMY!" elle n'avait en tout et pour toute réponse droit qu'a un étrange silence nocturne.

* Où a-t-il bien pu passer? C'est incroyable qu'il ait réussi à filer comme ça alors qu'il est malade. Ca va faire une heure que je le cherche, et j'ai pourtant tout fouillé. Tout fouillé.... à moins que. *

Elle compris que le dernière endroit qu'il restait à fouiller était le cimetière, elle était certes effrayée par ce que dégageait ce lieu sacré mais si elle savait quelque chose à propos des petits garçons de huit ans c'est que piqués de leur curiosité infantile ils étaient capables de dépasser leur peurs.

Elle arriva dans le cimetière et surpris GaJin en compagnie de Keiitaro, une fleur en main. Ils se tournèrent vers elle.

- On dirait que je tombe mal, dit-elle non sans une note de lassitude dans la voix. En plein rendez-vous, désolée je cherchais le petit Timmy mais apparemment il ne doit pas être là....

Keiitaro se pencha et sentit la fleur, et même si ce n'était pas désagréable ce n'était pas vraiment quelque chose de passionnant pour lui. Il écouta GaJin, qui semblait toute contente de partager son savoir, et allait demander si les fleurs étaient la seule raison pour sa sortie lorsque Antoinette s'était montré, apparemment contrariée, mais surtout avec la mauvaise idée en tête.
Amusé, il se redressa et épousseta légèrement son pantalon.

- Ah, Antoinette, qu'est-ce qui te fait croire que c'est un rendez-vous? Je ne suis peut-être pas très romantique, mais je sais qu'un cimetière n'est pas vraiment l'endroit idéal pour séduire qui que ce soit... A part un zombie bien sûr.

* Ou éventuellement quelques personnes du village, mais loin de moi cette idée, merci bien. *

Il s'approcha de la jeune française, mettant à nouveau une de ses mains dans ses poches de jeans, et pointa GaJin du pouce avec l'autre main, ses lunettes lui glissant un peu sur le nez.

- Si je suis là, c'est seulement parce que cette tête vide avait perdu quelque chose sur la route. Et le jour où je voudrait me trouver une âme-sœur, ne vous en faites pas, je mettrais une affiche marqué "WANTED" sur le panneau d'affichage du Conseil.

L'idée le fit rire un peu. Une âme-sœur, mais bien sûr, et pourquoi pas une épouse tant qu'on y était?
Non, c'était vraiment ridicule. Ces femmes ne pensaient vraiment qu'à l'amour, c'en était presque irritant.

Antoinette baissa les yeux. Elle savait pertinemment que ce n'était pas le genre de Keiitaro mais un doute substistait. Elle sentait son regard sur elle comme s'il essayait de sonder ses pensées et ça l'a mettait mal à l'aise. Elle trouva après quelques secondes le courage de le regarder un instant dans les yeux:

- Je ne sais pas mais sa paraît être une excellante idée, un rendez-vous romantique secret dans un cimetière.

Voyant que Keiitaro la dévisageait. Elle éclata de rire.

- Je plaisante naturellement. Vous êtes libres de faire ce que bon vous semble et ce n'est pas demain la veille que tu trouveras une épouse Keiitaro. GaJin? Je ne veux pas savoir ce que vous faites ici, après tout ça ne me regarde pas, ajouta Antoinette.

* C'est bizarre mais je ne peux pas m'empêcher de penser que... non c'est ridicule. A moins que, ça ne me regarde pas. *

Lorsque Antoinette arriva, GaJin reprit sa cueillette, non pas que sa présence la dérangeait, juste qu'il fallait qu'elle s'y remette. Cela dit, elle ne pût s'empêcher d'éclater de rire quand elle fit référence à un rendez-vous galant. GaJin et Keiitaro, ça serait sans doute la meilleure du siècle, même si ils s'entendaient assez bien, mais tout de même, cela restait hilarant, puis GaJin ne pensait pas à ce genre de chose de toutes manières, c'était déjà assez compliqué de vivre dans peau que pour rajouter ça à la liste. Par contre, elle ne voyait pas en quoi l'idée d'un rendez-vous dans un cimetière était si ridicule, c'était un endroit très relaxant au contraire, mais bon passons.
GaJin pouffa encore à la remarque de Keiitaro. Par contre, elle trouva qu'Antoinette était bizarre, mais cela la faisait rire.

- Ah t'es trop drôle, tu sais.

Elle se sentit le besoin de donner une explication, peut-être pour rassurer son amie.

- Moi, je suis là pour ça, dit-elle en désignant les fleurs.

- Et lui,continua-t-elle en désignant désormais Keiitaro. Il est là parce que comme il l'a dit, ma petite tête vide avait perdu sa boucle d'oreille, et que le ciel est dégagé et qu'il fera beau demain.

Cela n'aiderait peut-être pas à rassurer Antoinette, ça aurait peut-être l'air suspect, mais c'était néanmoins ce que Keiitaro lui avait répondu quand elle lui avait demandé ce qu'il faisait dans le cimetière à cette heure et elle trouvait ça très amusant.
Sans rien ajouter, elle retourna à sa cueillette, elle en avait presque finit désormais, mais elle se questionnait sur ce qu'elle allait bien pouvoir faire pour occuper le reste de sa nuit.
Oh probablement des expériences avec son petit butin. GaJin se dit qu'un jour, elle ferait peut-être sauter sa maison à force de nouvelles expériences, elle pouffa encore une fois à cette idée.

Keiitaro accorda un demi-sourire et retint un soupir.
Il avait arrêté d'écouter une fois que Antoinette avait prétendue plaisanter. Bien sûr, il n'était pas dupe, il connaissait la jeune femme assez bien pour voir quand elle prenait des excuses ou détournait les conversations...
Et de toute façon ce genre de yadda-yadda entre filles ne l'intéressait pas.
Il aimait bien leur compagnie de temps à autres, mais leurs discussions étaient le plus souvent une plaie.

Il avança vers les sépultures alentours, regardant les noms gravés, puis s'arrêta et fronça les sourcils. C'était celle de l'Ainé, décédé il y a plus de sept ans. Celui qui avait fondé le Conseil et qui l'avait poussé à y entrer, entre autres choses.

* Et maintenant c'est limite moi qui fait son boulot... *

Soupirant, le bibliothécaire se retourna vers les filles qui semblaient discuter encore -- ou du moins, GaJin parlait tout en ramassant des fleurs, et Antoinette écoutait en restant droite comme un I -- et remonta ses lunettes qui avaient glissées sur son nez.

- Hé, vous comptez faire quoi après? On pourrait aider notre chère docteur à retrouver son patient.

A dire vrai, Keiitaro s'en fichait pas mal de Timmy et des pertes humaines d'Antoinette, mais il n'avait pas sommeil, alors autant faire quelque chose avant de tomber raide d'ennui. Et puis ça le faisait passer pour quelqu'un de gentil. 'Un point pour le japonais' aurait dit l'Ainé.

Et elle souria, comme toujours, il fallait qu'on croive qu'elle allait pour le mieux. Antoinette avait cessé de penser à Keiitaro comme autrefois, elle avait autre chose à penser. Mais elle se réjouissait de voir qu'ils pensaient qu'elle allait bien.

- Ne vous faites pas de soucis pour moi, continue de traquez tes plantes et toi...euh de vaquer à tes occupations diverses et variées, dit-elle dans un sourire. Timmy ne doit pas être aller très loin. Je le chercherais bien toute seule

* Puisque tout va bien, comme on dit. Les gens ne sont pas très difficiles à sonder et Keiitaro ma foi il exprime une envie de patrouiller avec deux jeunes femmes dans le noir proche de l'indécence, GaJin est dans sa période bizarre, donc je vais les laisser. *

- Bon, je vais y aller. Tâchez de ne pas tarder, demain la journée sera longue.

Et elle s'en alla.

GaJin avait toujours trouvé qu'Antoinette était une fille bizarre par moment, mais après tout, elle n'était pas vraiment à même de juger qui que ce soit. Quand la jeune femme disparut dans la nuit, elle haussa les épaules, n'essayant même pas de comprendre.
Elle reprit une nouvelle fois sa cueillette jusqu'à en avoir assez, après quoi, elle se releva les bras chargés de magnifiques fleurs blanches au parfum enivrant.
N'ayant plus rien à faire dans le cimetière, la jeune femme vint se planter devant Keiitaro.

- Bon ben je vais y aller aussi, oyasumi nasai Keiitaro-san~

GaJin adorait placer les quelques mots japonais qu'elle connaissait dans certaines de ses phrases, pas pour impressionner qui que ce soit, juste parce que ça aussi, ça l'amusait.
Puis elle tourna les talons et reprit le chemin de sa maison d'un pas bondissant, repassa devant le centre sans même y prêter attention cette fois-ci.

Arrivée chez elle, elle se plongea aussitôt dans ses grimoires, ceux qu'elle avait collecter tout au long de son errance, et ceux qu'Idril lui avait prêté et s'essaya à de nombreuse mixtures diverses qui contenait la belle de nuit toute la nuit durant, ce qui lui évita de repenser au passé sur lequel elle pleurait tous les jours et à ses cauchemars emplis de revenants et autres créatures sanguinolentes, ce qui la changeait un peu de ses habitudes.

Keiitaro salua vaguement Antoinette, puis se remit à regarder le ciel. Pas de mission de sauvetage ce soir. Peut-être bien qu'il allait rentrer tranquillement du coup, à moins que GaJin...
Ah, beh non.
La jeune femme lui dit bonne nuit, et s'en alla aussi. Il n'y avait presque pas prêté attention.

- Oyasumi girls, marmonna-t-il pour lui-même.

Il jeta un dernier regard alentour, s'attardant quelques instants sur la pierre tombale de l'Ainé, et décida de partir à son tour.
Chantonnant vaguement, il passa devant le Centre et s'arrêta devant le portillon qui en bloquait l'accès de nuit, regardant par les fenêtres. Des mouvements vagues, des impressions de présences, des bruits sourds à peine audibles...
Keiitaro retira ses lunettes et fixa une fenêtre au deuxième étage. Une ombre passa.

* Montrez vous, allez... Venez... *

Mais rien. Impossible de dire même si ce qu'il avait vu était réel ou juste un jeu de lumière.
Grognant sa frustration, il remit ses lunettes, enfila son blazer qui pendait toujours à son bras depuis qu'il avait quitté la bibliothèque, et prit la direction de sa maison.

[ F I N . D U . S U J E T ]