Les Aubes sont Mortes [TERMINE]

Un froid intense pénétrait par toutes les pores de sa peau. Ethan tremblait. Le réveil de la jeune femme avait été douloureux. Elle était allongée sur le sol, les vêtements en haillons, ses longs cheveux bruns épars, le teint plus pâle que d'habitude, la gorge sèche et tout ce qui faisait d'elle une mauvaise héroïne de série dramatique. Elle ne se souvenait même plus s'être écroulée de fatigue dans une vaste forêt fort peu accueillante il fallait bien l'avouer. Durant ces dix dernières années, elle avait errée comme une âme en peine parmi les ruines et les paysages stériles. Se nourrissant de ce qu'elle trouvait çà et là dans des endroits qui avaient quelque peu survécus aux catastrophes, se lavant dès que l'occasion se présentait à elle, Ethan avait passée dix ans de sa vie dans la solitude la plus totale. Dans les premières années de son errance, elle était complètement déboussolée, ayant perdue tout ce qui lui était cher. Sa famille, ses amis, son fiancé… Elle l'avait d'ailleurs quittée sur une dispute plus que violente, et Ethan avait vu rouge… peut-être un peu trop, mais elle ne se souvenait plus très bien. Ou du moins ne voulait-elle pas s'en souvenir.
Frissonnante, la jeune femme se releva difficilement. Ses membres meurtris par le froid étaient engourdis et elle arrivait à peine à avancer sur le sol jonché de feuilles mortes. Les grands arbres qui l'entouraient la rendaient mal à l'aise. Elle avait l'air d'une folle tout juste échappée de l'asile. Les branches craquaient dans un bruit sinistre sous les assauts des rafales de vents, et quelques feuilles envolées venaient se loger dans les cheveux d'Ethan. Elle avança d'un pas mal assuré, son cœur battait anormalement fort. Attentive à tous les bruits qu'elle entendait, elle s'arrêtait fréquemment et se retourna vigoureusement tous les deux mètres. Le sang battait à ses oreilles. Ethan était devenue assez paranoïaque. Et l'ambiance de la forêt ne faisait rien pour la rasséréner. Une lumière trop blanche et pourtant terne filtrait à travers les longues branches d'arbres pratiquement dépourvus de feuilles. Le soleil était masqué par une couche de fins nuages gris. Le ciel semblait malade. Le silence qui régnait dans ce paysage stérile était oppressant. La jeune femme fut prise d'une soudaine quinte de toux, ce qui la força à s'appuyer de tout son poids contre un grand bouleau à l'aspect fragile, et donc le bois semblait pourri. Impression qui fût renforcé par l'horrible bruit de craquement qu'émit le vieil arbre. Tant bien que mal, la jeune femme reprit son chemin. Son apparence squelettique collait parfaitement bien à l'ambiance. En effet, elle ne trouvait que rarement de la nourriture et lorsque c'était le cas, ce n'était pas bien copieux. Aussi donc la silhouette de la jeune femme s'était quelque peu fragilisée. Malgré tout cela, son visage avait sût garder une certaine beauté et une certaine grâce. Bien que ses joues fussent plus creuses, ses lèvres et son teint en général plus pâles, ses grands yeux bruns gardaient leur aspect d'antan, bien que la fatigue et la solitude puissent se lire facile à l'intérieur de ceux-ci.
Les jambes d'Ethan vacillèrent sous elle, et avec un soupir à fendre l'âme, elle s'écroula par terre, incapable de faire un pas de plus. Elle n'avait plus la notion du temps, ni même celle de distance, et si elle avait regardée derrière elle, la jeune femme se serait aperçu qu'elle n'avait pas vraiment avancée. De plus elle pensait s'être foulée la cheville, mais la douleur était largement supportable.
De toute évidence, dans une forêt aussi grande et étrange que celle-ci, il serait donné à n'importe qui de se perdre. Et ce n'est pas les petits oiseaux qui allaient lui montrer le chemin vers la jolie petite maison, songea la jeune femme amèrement. Lasse et à bout de force, elle appuya son dos contre le tronc de l'arbre le plus proche. Elle regardait autour d'elle avec appréhension et très sincèrement, une once de peur revenait s'insinuer dans son esprit. Elle ramena ses genoux contre sa poitrine, et fixa le sol, en se balançant d'avant en arrière. Elle était seule… et ce peut-être jusqu'à la fin de sa vie. Elle se doutait que peut-être, il y avait d'autres survivants comme elle (elle ne pouvait être seule sur la planète Terre, cela aurait été ridicule !) mais il n'y croyait pas vraiment. Pour elle, ce serait un optimisme proche de la sottise. Et pourtant elle voulait croire, avoir une petite lueur d'espoir, qu'un jour elle allait finalement croiser le chemin de personnes ayant survécus, tout comme elle, et ainsi retrouver un semblant de vie sociale, bien qu'elle serait éternellement marquée par ces dix années de solitude, de doute et d'angoisse, emplis de cauchemars flétris…

Antoinette s'était levée de bonne heure ce matin, fidèle à sa routine du vendredi matin, s'était à son tour de patrouiller les abords de la forêt. Elle avait donc rendue visite à ses précieux patients encore endormie juste pour s'assurer qu'ils ne manquaient de rien.
Le vendredi c'était son jour, dans la semaine, les membres du Conseil Supérieur et quelques uns du Conseil Inférieur se répartissaient une patrouille tous les deux jours pour inspecter les environs de la forêt au cas où un nouvel arrivant se présenterait. Ce n'était pas arrivé depuis un moment mais ils continuaient inlassablement à se relayer tous les deux jours. C'était Antoinette qui y était pour beaucoup dans cet acte, les autres voulaient abandonner depuis quelques mois mais elle était persuadé qu'une personne viendrait et qu'il fallait l'acceuillir et lui prodiguer les soins dont elle avait besoin. Dans son habituel panier, il y avait une bouteille d'eau, tout un nécéssaire de premier soin et quelques biscuits de fabrication main, une serviette humide, et enfin une seconde serviette. Elle tenait à venir en aide à ceux qui arriveraient comme on lui avait venue en aide, elle voulait que cette personne ne se sentent plus jamais seule comme elle avait été, qu'elle se sente sauvée. Son arrivé personnelle à Hollowish avait été vue comme une nouvelle lueur d'espoir, une raison d'être de vivre. Elle s'en rappelait avec une certaine nostalgie, suivait la conaissance de GaJin puis des autres. Ce sentiment de soulagement, celui d'avoir échappé à une vie sans aucun sens, une vie de vagabondage qui s'achèverait prématurément. L'année d'errance qu'elle avait passée lui avait ôté tout espoir de retrouver une vie, parce que ce n'était plus une vie et longtemps elle avait cru être définitivement la seule survivante.
La lumière du Soleil traversait difficilement l'épais feuillage des grands arbres de la forêt, il y avait une légère brise qui caressait le doux visage de la française, les nuages étaient d'un blanc très pur, le ciel affichait un doux rose teinté par le Soleil. C'était une belle journée.
Antoinette avait le sentiment qu'aujourd'hui sera une bonne journée en perspective, cette sensation était douce et agréable. Peut-être qu'aujourd'hui quelqu'un viendrait à elle ou mieux encore...
Viktor reviendrait. Ça la prennait quelques fois. Les bons jours elle espérait que son fiancé reviendrait.
Elle s'arrêta dans sa marche, elle sourit puis reprit.

* Peut être aujourd'hui, je le trouverait ici...*

Elle cru entendre un bruit de feuillage, elle s'arrêta net. Son sourire coula. Était-ce possible? C'était très peu probable mais rien ne coûtait d'aller vérifier tout de même. Avec une certaine candeur, Antoinette se mit à penser que son fiancé était peut être revenu, sans se demander si cela était possible ou non, elle avança dans la forêt, avec prudence en regardant bien où elle marchait.

- Viktor, c'est toi? se risqua-t-elle.

Elle avança encore. La lumière du Soleil faiblissait au fur et à mesure qu'elle avançait. Le feuillage s'épaissisait à certains endroits où les branches se faisaient plus nombreuses et plus basses. Un bruit encore l'immobilisa. Elle regarda à gauche, puis à droite, rien.

- Mon chéri? C'est moi, c'est Antoinette...Tu es là?

Elle commença à marcher plus rapidement encore son regard balayant de gauche à droite les environs. Quand elle l'a trouva.
Elle s'arrêta net. Assise comme un petit enfant contre un arbre, les genoux repliés contre sa poitrine, ses bras les tenant serrés comme si ils allaient se deplier à son insu. Le regard vide, elle était très maigre mais très belle. Ses vêtements étaient en lambeaux, elle avait un air misérable, ses cheveux étaient visiblement sales, sa peau était laiteuse, elle semblait malade.
Le coeur d'Antoinette fit un bond à la vision de ce triste spectacle. Elle s'avança prudemment, le visage désolé et grave à la fois. La jeune fille ne sembla pas la remarquer.
Elle se mit à genoux, posa son panier à côté d'elle et sortit sa serviette humide. Elle se pencha vers la jeune personne.

- Comment t'appeles-tu? demanda-t-elle avec douceur.

Ethan avait les yeux dans le vague. Elle regardait sans voir le sol teinté par les feuilles de brun, de jaune ou encore d'un vert très foncé. Malgré son regard perdu, elle réfléchissait à milles choses. Que faire à présent ? Elle avait l'étrange sensation que quelque chose allait se produire, qu'elle allait enfin rencontrer un survivant tant attendu. Elle se pensait folle d'espérer à ce point, que pouvait-elle faire d'autre ? Elle se demandait si elle était encore dotée de la parole après toute ces années seule. Elle n'avait pas eu de Wilson à portée de main. Elle ne se parlait qu'à elle même, et c'était un miracle si elle n'était pas devenue complètement folle. Mais la jeune femme songea qu'après tout, si elle pouvait encore penser distinctement avec un vocabulaire convenable, elle serait capable de s'exprimer à voix haute. Durant les premiers mois de son errance, elle se parlait à voix haute, pour se rassurer, pour se dire que tout allait bien, qu'elle n'allait pas être seule, qu'on viendrait la chercher. Elle avait finir par abandonner. Plusieurs pensées traversèrent son esprit lors de son dix-neuvième anniversaire. Elle avait pensée se laissée mourir, ou pire, mettre fin purement et simplement à ses jours avec ses propres moyens. Mais elle avait l'imperceptible conviction qu'elle se devait de continuer, dusse-t-elle souffrir jusqu'à la fin des temps. Elle voulut se lever pour reprendre sa route, mais lorsqu'elle tourna la tête vers la droite, elle failli pousser un cri, et eut un mouvement de recul.
Devant elle se tenait une femme qui devait à peu près avoir le même âge qu'elle, bien que la jeune Ethan ne savait que vaguement quel âge elle devait avoir. Elle était extrêmement belle. De longs cheveux blonds et ondulés tombaient gracieusement sur ses épaules. Son teint d'albâtre était sublimé par deux yeux couleur noisette.

- Comment t'appelles-tu ?

Le ton de sa voix était doux et protecteur. Mais malgré ça, Ethan était sous le choc. Il y avait bien quelqu'un, un survivant. La brune devait paraître comme possédée, les yeux écarquillés et la bouche entrouverte. Les yeux d'Ethan allaient et venaient du panier situé près de la jeune femme blonde, au visage angélique de celle-ci. Un silence s'était installé avant qu'Ethan ne reprenne peu à peu contenance. Elle se redressa et replaça d'un geste de main une mèche de ses cheveux sales et emmêlés derrière son oreille.

- Euh… je…je suis… Ethan. Ethan McKeller.

Sa voix était faible et enrouée. Ce qui était normal dans l'esprit de la brune, après tant d'années sans parler. Elle avait balbutiée sa réponse comme une enfant prise au dépourvue, et elle était d'autant plus étonnée qu'elle connaisse encore ses nom et prénom.

- Euh.. où sommes-nous ?

La voix de la jeune femme reprenait peu à peu son timbre naturel. Une voix douce, au léger accent Irlandais facilement reconnaissable. Elle toussa un peu, mais essayait de le masquer au mieux. Elle ne voulait pas affoler la blonde en face d'elle en lui laissant penser qu'elle se trouvait à l'article de la mort. Mais elle dramatisait toujours les choses. Soudain, la lumière dans la forêt se fit plus présente et plus douce. Malgré les épais branchage, les nuages avaient laissé place au soleil, qui réchauffait agréablement le visage d'Ethan. Ou peut-être s'en rendait-elle compte juste parce que le simple fait de la présence de la femme la rassurait, annihilant tous sentiments de peur ou d'angoisse. Dans le nouveau silence qui s'était installé, laissant le temps à la blonde d'assimiler rapidement les informations que venait de lui donner Ethan, la jeune brune lui lança un timide sourire. Elle était assez impressionnée par l'aura que dégageait la jeune femme au teint de porcelaine. Rien que de part le fait qu'elle ne semblait nullement perdue en ces lieux, mais également parce qu'elle ne sortait manifestement pas de n'importe où. Ses cheveux brillaient d'un vif éclat dorée sous le lumière du soleil, et surtout, elle semblait en très bonne santé. Peut-être y avait-il un village, ou ne serait-ce qu'une petite bourgade aux abords de cette dense forêt ? Ethan se disait que c'était de plus en plus probable. Après tout, après dix ans, durant lesquels elle avait constamment priée et louée le Ciel pour lui permettre de rencontrer quelqu'un, elle avait enfin été trouvée plus qu'autre chose par une survivante. Malgré son désespoir, son vœux le plus cher avait été exaucé. Elle savait que désormais, elle était en sécurité.

Après qu'elle eut posée sa question, Antoinette ne s'attendait absolument pas à ce que la jeune femme réponde. Pourtant c'est qu'elle fît.

- Euh… je…je suis… Ethan. Ethan McKeller.

Elle avait dans la voix une légère trace d'un accent irlandais, elle semblait perdu l'habitude de parler car un voile rauque lui embaumait la voix. Antoinette pris la serviette humide et épongea le visage de la prénommée Ethan, puis elle posa rapidement le revers de sa main sur son front.
Elle sourit à nouveau lorsque la pauvre femme reprit la parole avec difficulté, et n'en fût que plus surprise encore.

- Euh.. où sommes-nous ?

Antoinette se demanda où cette femme trouvait la force d'encore parler. Elle était brûlante et donc devait mourir de froid. Elle chercha dans son panier et y trouva au fond une épaisse couverture polaire qu'elle enfila à Ethan.

- Je m'appelle Antoinette Jewels, ne vous préoccupez pas pour l'instant où nous sommes, d'accord? Nous vous expliquerons tout une fois à Hollowish, dit-elle en s'approchant de son visage pour la rassurer. Où sont les autres?

Pour lui laisser le temps de reprendre ses esprits et de répondre à sa question, Antoinette sortit un peu d'ibuprofène de son panier qu'elle tendit à la jeune femme avec la gourde d'eau.

- Prenez donc ça, il faut faire tomber la température.

Elle semblait assez désorientée mais d'une bravoure assez peu commune, il fallait pas mal de courage pour braver la fièvre et tenir encore. Cette femme qu'elle ne connaissait pas lui avait adressé la parole sans essayer de trop comprendre qui elle était.
Sans attendre, sa réponse, Antoinette comprit. Elle était seule et cela devait faire quelques temps déjà, la maladie avait dû s'inviter dans sa caravane ou bien ils se sont perdus à un moment. Ça arrivait quelque fois d'après le récit de quelques villageois qui arrivaient. Un peu triste, Antoinette épongea de nouveau le visage d'Ethan.

Ethan se laissait docilement faire. La blonde la revêtit d'une couverture polaire. Celle-ci était plus que bienvenue, car la brune se sentait de plus en plus endolorie par le froid. Elle resserra la couverture autour de ses frêles épaules, et s'assit en tailleur. Antoinette lui appliqua sur le visage une serviette mouillée, ce qui eut la faculté de décontracter la jeune femme. Le contact de l'eau, aussi minime soit-il, avec sa peau lui faisait un bien fou. La jeune femme ne répondit pas tout de suite à la question de la blonde, trop occupée à encaisser le choc que ça lui faisait de voir quelqu'un, et de reparler à quelqu'un. Comme une bonne petite fille, elle prit le cachet et l'eau que lui tendait Antoinette. Elle toussota un peu quand elle avala l'eau. Cela faisait tant d'années qu'elle n'avait pas bu une eau fraîche et potable.
Après s'être essuyée la bouche d'un revers de main, elle rendu la gourde à la jeune blonde et entreprit de répondre à sa question.

- Il n'y a pas d'autres… dit-elle, sur un ton un peu triste. Je suis seule.

Je suis seule… combien de fois se l'était elle dit ? Elle avait perdu le compte, mais il devait bien dépasser le millième de fois. Ces trois mots revenaient sans cesse s'insinuer dans son esprit. * Tu es seule et tu ne peux rien y faire *. Oui, c'était ce qu'elle se répétait à longueur de journée. Mais maintenant, tout allait changé. Antoinette avait évoquée Hollowish. Peut-être était-ce le nom de la ville dans laquelle elle vivait ? Oui assurément, ou du moins, Ethan se sentait protégée et rassérénée en imaginant tout un village avec différente personne. Peut-être y aurait-il des gens qu'elle connaissait, ou qu'elle avait connu d'une quelconque manière. Elle en doutait fortement, mais après ces quelques minutes passées en la compagnie de la jeune femme, plus rien ne lui semblait impossible.
Toutes ces pensées ragaillardissait la jeune femme. Son côté enfant apeuré disparaissait progressivement, bien qu'elle ne redevint pas la jeune étudiante brillante et déterminée qu'elle était il y a dix ans. Quelques minutes de discussions ne peuvent changés une femme rongée par une existence précaire et solitaire.
Néanmoins, ces quelques minutes lui redonnaient force et courage. Elle s'éclaircie la gorge et se frotta les mains. Elle remarqua alors qu'elles étaient complètement écorchées, et par endroit la peau était à vif. C'était le cas pour pas mal d'endroit de son corps, notamment ses jambes et ses bras. La peur, l'angoisse, le doute et la solitude avaient-ils réussi à annihiler toute souffrances physiques ? Cela devait être le cas, car la jeune brune s'aperçu rapidement que les parcelles de peau qui lui manquait la faisait souffrir. Elle releva la tête vers la blonde et se risqua timidement à la question qui lui brûlait les lèvres.

- Est-ce qu'il y a… d'autres personnes de votre côté ? Je veux dire… des... des survivants ?

Elle avait prononcée ce dernier mot avec appréhension, aussi grimaça-t-elle lorsqu'elle eut finie sa phrase. Il était vrai que c'était un terme approprié mais cependant, elle se doutait que si survivants il y avaient, ils devaient être comme Antoinette, parfaitement installés et ayant repris une vie quasi-normale.
Ethan n'était qu'une femme perdue et déboussolée, mais elle espérait bien, après quelques mois passer en compagnie de gens bien vivant, redevenir une femme digne de ce nom.

La tristesse submergea Antoinette lorsque Ethan lui donna sa réponse, elle sortait quelques bandages simplement pour éviter les infections au niveaux des bras, des jambes, des mains et de pieds écorché lorsqu'elle ralentit.

- Il n'y a pas d'autres… Je suis seule.

*Je suis seule*

Elle connaissait que trop bien cela. La solitude propre était difficilement supportable, celle des autres était insupportable. Antoinette qui avait fait de sa famille tout ceux qui devenait ses patients adopta presque la jeune femme bien qu'elle parurent être à peu de choses près de même âge.
Elle était dans un sale état, se disait Antoinette en commençant à bander les mains de Ethan. Par seule combien de temps avait-elle entendu? Il y a neuf ans, Antoinette avait donnée une réponse à peu près pareille à GaJin qui l'avait trouvée dans la forêt, mais elle avait été seule depuis le début, depuis le début de la fin. Il était impossible que ce fusse le cas de cette femme, comment aurait-elle survécu dans d'atroces conditions, Antoinette se rappelait l'année qu'elle avait passée après les Cataclysmes, et seule de surcroît.

- Est-ce qu'il y a… d'autres personnes de votre côté ? Je veux dire… des... des survivants ?

Antoinette sourit. Elle était quelque part heureuse de lui donner une raison de se réjouir, une raison de vivre nouvelle qui s'offrait à elle. Le sentiment d'être sauvée...

- Il y en a plus que ce que tu ne crois, beaucoup plus que ce que tu crois, nous sommes une communauté qui vit à la lisière de cette forêt, sur place nous disposons de tout ce dont nous avons besoin, répondit-elle tout en pensant les plaies de la jeune femme. Nous ne sortons jamais du village, mais nous t'expliquerons tout une fois à Hollowish.

Une bonne journée. Oui, ce n'était pas Viktor mais elle avait néanmoins trouvé et sauvé quelqu'un. C'était une bonne journée. Mais son sourire s'évanouit de son visage qui devint plus sombre et triste.

- Seule? Depuis combien de temps n'es-tu plus avec ta caravane?

Antoinette avait dû remarquer que la jeune Ethan était blessée, car elle pansa immédiatement les blessures de la brune. Décidément, Antoinette avait tout le matériel nécessaire pour soigner les gens. Peut-être était-elle infirmière ? Ou seulement une jeune femme prévoyante. Ethan aurait tout le loisir de le découvrir une fois au village. Elle aurait alors le loisir de poser toutes les questions qu'elle souhaitait, elle en était sûre. La journée lui apparaissait plus radieuse à présent. Et la vie en générale allait être plus plaisante.

- Seule ? Depuis combien de temps n'es-tu plus avec ta caravane ?

Ethan fronça les sourcils. Elle rassemblait ses souvenirs. Une caravane ? Ou voulait-elle en venir ? Il est vrai que certaines période de sa vie après le cataclysme restaient floues dans l'esprit de la jeune femme. Son passé était ponctué d'amnésie partielle, durant lesquelles elle ne se souvenait absolument pas si elle avait été seule ou non. Il est vrai que passé dix ans de solitude et avoir survécu, en étant presque indemne semblant surréaliste. Peut-être n'avait-elle pas été aussi seule qu'elle le prétendait.

- Eh bien, aussi loin que remonte mes souvenirs, j'ai toujours été seule. C'est vrai que ça paraît complètement dingue que j'ai pût passée 10 ans seule, isolée, mais pourtant, c'est le cas.

Ethan parlait avec plus d'aisance à présent. Oui, c'était clair que maintenant, elle n'avait pas pût être seule, complètement seule pendant tout ce temps, si elle pouvait en si peu de temps parler avec tant de simplicité. Mais elle ne souhaitait pas se remémorer ces parts d'ombres de son passé. Elle sentait que ce n'était pas très glorieux. Mais des images s'imposèrent d'elles-mêmes dans sa tête. Des visages hideux, des voix rauques, des taudis plus qu'insalubres et tout ce qui pouvait contribuer à renforcer l'aspect glauque des souvenirs de la jeune femme, faisant ressembler sa vie à une mauvaise série B américaine.
Elle ferma les yeux et secoua un peu la tête pour chasser ces souvenirs honteux et cauchemardesque. Elle resta silencieuse le temps que la blonde finisse de panser ses plaies. Elle rompit le silence, et lança d'un ton qui se voulait dégagé.

- Pourquoi ne sortez-vous jamais du village ? Enfin au vu de la forêt, je comprends pourquoi, mais tu… vous… êtes bien là ?

Ethan se sentait affreusement gênée. Elle ne savait si elle devait vouvoyer ou tutoyer Antoinette. En tout cas, le fait qu'elle ne se sente pas vraiment à l'aise avec des inconnus, aussi rassurant soient-ils, cela n'avait pas changé.
Malgré le ton dégagé qu'elle avait essayé d'adopter, la jeune femme ne pouvait cacher son excitation. Elle retrouvait un semblant de sentiment humain, dont le bonheur, l'allégresse, l'excitation et tout ce qui s'en suit. Elle avait hâte de quitter cette forêt, bien qu'un peu plus lumineuse, possédait toujours une atmosphère oppressante. Et découvrir un nouvel environnement pouvait se révéler plus que décisif pour l'avenir de la jeune femme. Malgré qu'elle n'ai pas eu de diplôme, elle espérait bien se rendre utile. Retourner vers la vie, ça allait être comme un nouveau souffle, plus qu'un nouveau départ pour elle. Son bonheur devait se lire sur son visage, car un sourire un peu niais il fallait l'avouer sublimait son visage, la rendant rayonnante et laissant voir sa beauté naturelle.

Avec tout le soin et la grâce qui lui était donné, Antoinette s'occupait des blessures de Ethan à renfort de compresse et désinfectant afin d'éviter qu'elle ne s'aggravent. Elle remarquait que la jeune femme avait pris vite une confiance en elle assez démesurée ce qui signifiait probablement qu'elle n'avait pas eu de compagnie un certain temps.
Ce trait de caractère facile et ouvert aux autres, Antoinette l'avait déjà souligné dans le passé. Mais à ce moment là, tout était différent.

* C'était sept ans plus tôt...*

Elle soignait un homme robuste, grand, qui l'attendait alité, le torse nu, rempli de bandage, elle prenait soin de ce patient tout particulier car ce qui lui était arrivé n'était pas banal. Il s'occupait de la rénovation des lignes électriques du village qui s'étaient endommagé, un travail long, fastidieux et risqué cependant quelques grandes figures masculines du village s'y étaient proposée, mais le malheureux patient en question, lui , c'était pris un violent coup de jus qui par un heureux miracle ne lui fut pas fatal. Il subit quelques brûlures tout au plus et quelques fractures pour être tomber du poteau électrique.
Ce Jour Là, Antoinette lui apportait ses médicaments et son petit-déjeuné. Elle entra en faisant le moins de bruit possible pour ne pas le réveiller, elle se pencha afin de poser le plateau sur sa table de chevet et au moment de se relever, il l'observait. Il l'observait en souriant, les yeux plissés et le sourire aux lèvres. Un peu gênée, elle sourit aussi et baissa les yeux.

- Bonjour. Je..Je pensais que vous dormiez, lui dit-elle en levant les yeux. Ce sont vos médicaments et votre petit déjeuner. Je crois que je vais vous laisser...

Elle s'apprêtait à partir et lui tournait déjà le dos, quand il prit la parole.

- Non, restez, répondit le patient.

Antoinette se retourna un peu surprise, la veille il prenait dans les trois milles volts et aujourd'hui il trouvait la force de se lever de bonne heure, de parler à une inconnue, et de... de se lever. Il appuya sur ses bras pour être assis sur son lit en faisant une grimace. Il regarda ses bras, endommagé eux aussi qui avaient du mal à répondre.

- Restez, s'il vous plaît.

Au dépourvu, Antoinette s'assied sur le lit du jeune homme qui émit à nouveau un faible sourire.

- Vous êtes un membre du Conseil Supérieur, n'est ce pas?demanda-t-il.
- Inférieur, corrigea Antoinette.
- Que m'est-il arrivé?

Rapidement le jeune médecin lui expliqua son triste incident de la veille. Durant les explications, le patient avait le regard tourné vers le bas et acquiesçait sans un mot. Quand elle eût fini, il voulut prendre son plateau mais n'y arriva pas.

- Attendez, dit Antoinette avec patience en se penchant vers le plateau en même temps que le jeune homme. Je vais vous aider.

Elle prit le plateau sur ses genoux et prit un grand cuillère des céréales qui se trouvaient dans le bol pour les lui faire manger.

- Attendez, dit-il en retenant doucement sa main. Ce sont des céréales à quoi? demanda-t-il avec une moue humoristique.

Antoinette mit la bouchée dans sa bouche et sourit.

- Au miel, dit-elle.

Elle reprit un cuillerée qu'elle s'apprêtait à remettre dans sa bouche quand son patient s'avança et avala le contenu de la cuillère. Tout près d'elle, le visage plus bas que le sien, il affichait un sourire complice. Antoinette se doutait de l'effort qu'il lui avait fallu pour être ainsi après tant de blessures.

* Ce temps là est révolu.*

Dans ses pensées, la réponse de Ethan l'interrompt.

- Eh bien, aussi loin que remonte mes souvenirs, j'ai toujours été seule. C'est vrai que ça paraît complètement dingue que j'ai pût passée 10 ans seule, isolée, mais pourtant, c'est le cas.

Dix ans. Dix longues années de solitude. Dix longues années sans parler à quiconque, sans rire, sans personne. Dix ans. Antoinette s'arrêta dans ses gestes et fronça les sourcils. Puis elle se remit à appliquer ses désinfectants. Dix ans. Dix ans. Les mots sonnaient telle une cloche dans sa tête. C'était bien trop long. Un an pour elle avait été un cauchemar. Le froid, la solitude, la tristesse infinie sans fin d'avoir tout perdu, la faim, la soif. L'enfer se trouvait sur Terre et elle le vivait priant le soir pour mourir rapidement, se déplaçant on ne sait où, on ne sait pourquoi ni comment. Le regard hagard de tout ce qui avait été détruit, le cerveau ankylosé et les bleus qui s'étaient formés des chutes qu'elle avait fait. Le silence le plus total, le murmure du vent qui l'accompagnait, les grondements du tonnerre qui quelques fois retentissait. Une année de plus ainsi, et s'en était fini d'elle. Or, cette femme avait tenu dix ans. Antoinette voulu pleurer.

- D...Dix ans. Dix ans...répétait-elle. Comment est-ce possible?

Se répétant toujours dix ans, elle ignora la seconde question de la jeune femme, une question qui si elle était soulevée ferait du bruit dans la forêt près du village de Hollowish.

Ethan ne comprenait que trop bien la réaction de la jeune femme. Après tout, peut-être que dans ses moments d'errance et d'amnésie la jeune Ethan avait-elle croisée le chemin de quelques personnes. Ou peut-être était-ce dû à son cerveau perdu et le contre-coup de la solitude et de l'angoisse qui l'avait fait imaginée cela. Elle ne savait pas. Elle essayait de ne pas trop s'en faire pour ça. Il valait mieux oublier ces dix années d'existence misérable et précaire. Ethan pensait que les souvenirs les plus douloureux sont automatiquement effacés par l'inconscient. Peut-être était-ce vrai, elle n'en avait encore jamais fait l'expérience.
La blonde continuait de panser les plaies de la brune. Par moment le désinfectait piquait sa peau, mais c'était supportable. Elle remarqua qu'en plus des blessures, plusieurs ecchymoses se faisaient voir sur son corps. Elle appuya sur une contusions particulièrement importante sur son bras et s'attendait à avoir mal. Mais au lieu de grimacer de douleur, la brune haussa les sourcils et réitérait son geste plusieurs fois, surprise par le fait qu'elle n'avait aucunement mal. Elle reposa sa main sur le sol feuillus avec un petit soupir. De légères brises venaient de temps en temps balayer les feuilles autour des deux jeunes femmes. Antoinette ne semblait pas disposer à répondre à sa dernière question. Ethan n'insista pas. Peut-être était-ce un sujet qu'il valait mieux éviter. La brune regardait autour d'elle avec plus de calme qu'il y a quelques minutes. Il n'y avait pas de quoi paniquer, enfin si un peu, mais pas au point de faire une crise d'hystérie. Il est vrai que lorsqu'on est on seul, la peur et l'angoisse deviennent omniprésente et vous enserre l'esprit comme un étau. Mais à deux, tout ce qui est propice à l'effroi, tout ce qui nous paraissait effrayant ne l'était étrangement plus. Tout devenait plus doux, plus calme, plus accueillant dans certains cas. Bien que cette forêt, même vu d'un œil plus calme n'avait rien, mais alors rien, d'accueillant. Ça ressemblait plus à un décor de film d'épouvante que la charmante petite forêt du Petit Chaperon Rouge. Mais ça, elle l'avait bien assez pensé. Ethan ne savait pas si c'était l'aube ou le crépuscule. Mais la brise fraîche qui caressait son visage lui faisait pensé à une matinée fraîchement entamée. Elle ne savait pas quel jour c'était aujourd'hui, ni quelle année. Elle n'était même plus sûre de savoir combien faisait 2 fois 2 dans cette forêt. Peut-être exagérait-elle un peu trop. Elle fixait un point dans le bois, là où le spectacle des feuilles tourbillonnantes avait quelque chose d'enivrant. Elle demande, de sa voix douce, avec un air lointain.

- Quel jour sommes-nous ? J'ai perdu la notion du temps depuis vous savez…

* Ce n'est guère étonnant * songea-t-elle amèrement. Elle avait bien pensé à faire comme les naufragés, graver sur un rocher ou un arbre des petits bâtonnets signifiant les jours qui passaient. Mais elle était trop perdue à l'époque pour y avoir pensé. Quand vous êtes complètement perdu et démuni, vous retrouvez une sorte d'instinct animal, et toute pensées civilisées sont annihilées. Et puis d'ailleurs, les paysage qu'elle arpentait était vides d'arbres et elle ne trouvait pas de quoi entailler un rocher. Aussi avait-elle finie par abandonner toute notion de temps et d'espace. Ethan restait le regard dans le vague, perdue dans ses pensées. Elle se rappelait l'époque où elle était encore petite fille. Elle allait souvent faire des ballades à la campagne avec ses grands-parents. Spécialement son grand-père, la santé de sa grand-mère étant assez fragile. Elle se souvenait des grands espaces boisés, d'un vert foncé durant le printemps et l'été, brillant d'un vif éclat orangé quand venait l'automne, et enfin d'une blancheur immaculée une fois l'hiver arrivé. Les grandes plaines Irlandaises remplies de fleurs de toutes les couleurs et de toutes sortes. Elle allait en cueillir très souvent pour ses parents, à l'époque où elle s'entendait encore bien avec eu. Lorsqu'elle était adolescente, son grand-père la charriait très souvent sur le fait qu'il était bien loin le temps de la petite fille en robe violette et aux cheveux bouclés allant cueillir des fleurs pour ses parents…

- Quel jour sommes-nous ? J'ai perdu la notion du temps depuis vous savez…

Demanda alors Ethan. Antoinette avait du mal à imaginer comment les mots pouvaient lui venir. C'était bête mais quand on sortais d'une longue période d'isolement, les mots ne nous revenaient pas toujours, enfin c'est plutôt ce qu'avait difficilement vécu Antoinette de son côté. Elle avait du mal à aligner ses phrases, elle avait peur de ne pas être cohérente, il fallait ajouter à cela qu'elle avait très peur de ce qui l'attendait. La fatigue, les questions qui se bousculait, l'angoisse, l'isolement prolongé, c'était des facteurs qui justifiaient un mutisme conséquent.
Au lieu de cela, la jeune femme parlait dans une certaine confiance acquise peut être en raison des soins que lui prodiguait Antoinette, elle devait être passablement choquée tout de même et les questions devaient s'entrelacer dans sa tête mais au lieu de se taire, elle agissait naturellement, presque "par instinct" se disait Antoinette. Elle ne réfléchissait pas à une conduite à adopter, quelque chose lui venait, il fallait qu'elle en parle. Ce devait être dans son caractère, ainsi les réactions changeaient en fonction des situations et des personnes. La solitude prolongée chez Ethan MacKeller lui avait fourvoyé une confiance aveugle à la première personne qui l'en sortirait et qui lui porterait secours alors que celle d'Antoinette Jewels l'avait rendue méfiante, craintive et plus angoissée encore.

- Nous sommes Dimanche, répondit Antoinette. Essaye d'économiser tes forces, il faudra ensuite marcher jusqu'au village, entendu? Là-bas, je te promet de tout t'expliquer.

Du sang s'était mis à couler du nez de la jeune femme que Antoinette s'empressa d'essuyer avec un peu de coton. Elle était vraiment dans un état misérable, elle paraissait si fragile et chétive que la française se demandait comment avait-elle échapper à des maladies comme le typhus ou la tuberculose. Certaines de ses plaies devaient êtres infectées et pourtant...elle affichait un certain courage, une bravoure.
Une fois les derniers bandages fixés, elle aida Ethan à se relever tant bien que mal. Une fois debout, telle une mère couveuse, elle arrangea sur ses épaules la couverture polaire de sorte qu'elle n'ait froid. Antoinette regarda les pieds nus de la jeune femme. Elle n'allait pas se promener sans chaussures avec des panses aux pieds et une forte fièvre. Aussi, elle déchaussa et proposa ou plutôt imposa à Ethan de porter ses chaussures. Il était hors de question qu'elle ne soit plus malade qu'elle ne l'était déjà. Dix ans de solitude et d'isolement, c'était monstrueux. Personne n'en voudrait pour tout l'or du monde, Antoinette prit conscience qu'ils avaient tous de la chance de ne pas être dans le cas de Ethan MacKeller, que eux ils étaient ensembles depuis quelques années déjà. Honteuse, Antoinette s'efforça de ne plus y penser et se mit doucement en marche vers le village.

Ethan hocha légèrement la tête pour faire savoir à la jeune femme qu'elle avait entendu, mais ne répondit rien. Dimanche. Fin de semaine donc. Intérieurement, Ethan se sentit soulagée. Elle allait enfin pouvoir recompter les jours, et ainsi ne plus se sentir oppressée par ce sentiment d'inconnu qu'elle n'avait que trop côtoyé. Elle sentit quelque chose couler de son nez. Mais avant que la brune n'ai pût portée sa main à son visage, Antoinette entreprit de nettoyer avec du coton. C'était du sang. Ethan fronça les sourcils et un imperceptible souvenir, qui ressemblait plus à un cauchemar lui revint à l'esprit…

Une gigantesque tâche rouge sur un blanc immaculé. Un homme gisant dans une baignoire, le sang le recouvrant de toute part. Ethan était adossée au mur carrelé, la respiration saccadée, les yeux écarquillés. Dans ses mains une statuette de bronze à l'apparence de la Statue de Liberté, dont les pointes de la couronne étaient maculées de sang. Les mains d'Ethan étaient recouvertes de cette substance poisseuse. Elle avait la nausée. Pourquoi a-t-il fallu que ça se termine ainsi ?

La jeune femme toussa un peu. Ce souvenir lui appartenait-il vraiment ? Elle avait l'impression que c'était quelqu'un d'autre qui l'avait vécu, et qu'elle s'y était transposée. Cette bribe de son passée l'avait sévèrement ébranlée. Elle devait paraître encore plus fragile et misérable qu'auparavant. Au plus profond d'elle, Ethan possédait un courage dont elle ne savait rien, et qui ressortait de lui-même, sans que la jeune femme ne puisse s'en apercevoir. La blonde finissait de faire les derniers pansements de la jeune brune et l'aida tout doucement à se relever. Tant bien que mal, Ethan s'appuya faiblement sur elle. Sa cheville n'était plus douloureuse. Tant mieux, elle pouvait marcher convenablement à présent. Antoinette resserra la couverture autour des épaules d'Ethan, telle une mère qui veille sur son enfant. La brune se sentait beaucoup mieux. Le froid et certaines de ses angoisses avaient disparût et elle se sentait en quelque sorte renaître. Ethan regarda avec un certain étonnement la blonde retirer ses chaussures pour les prêter à Ethan. Celle-ci voulu protester.

- Non non ça ira, merci… je…

Devant l'insistance de la blonde, Ethan se rendit compte qu'elle n'avait pas le choix. Elle lui imposait de les porter. La brune céda.

- Très bien. Merci. soupira-t-elle, mais avec tout de même un petit sourire de reconnaissance.

Les deux femmes se mirent en route vers le village. Ethan ne se sentait pas très à l'aise avec des chaussures aux pieds. Cela faisait une dizaine d'années qu'elle n'en avait pas portée. Néanmoins, elle retrouvait ainsi un brin de civilisation. La brune marchait difficilement, la fatigue n'aidant pas. Pourtant, elle se sentait plus forte à présent que quelqu'un s'était occupé d'elle. Ethan savait pertinemment que si personne ne l'avait retrouvée, elle serait probablement morte de fatigue, de froid ou de maladie. Au fur et à mesure qu'elles progressaient, la forêt devenait de moins en moins dense, et la lumière se faisait plus présente. Un petit sentier se dessinait quelque mètres plus loin. Elle entendait quelques oiseaux émettre des piaillements incertains. Ethan releva la tête et son cœur fit un bond plus important dans sa poitrine. Elle apercevait quelques maisons. Et cette fois, elles n'étaient pas en ruines. Un vrai village s'imposait devant ses yeux. Un sourire illumina son pâle visage. La vie revenait en elle. Elle avait de nouveau un avenir et de l'espoir. Elle se doutait que l'intégration allait être dure, mais elle avait confiance. Elle ne serait plus jamais seule…